L’ÉCOLE DE LA RÉSISTANCE

L’ÉCOLE DE LA RÉSISTANCE

On connaît bien sûr l’histoire tragique de Guy Môquet, lycéen communiste du XVIIème arrondissement de Paris, fusillé en 1941, à 17 ans, qui a donné son nom à une rue et une station de métro. Ce qu’on ignorait, c’est qu’il y a eut des dizaines de Guy Môquet à Paris pendant l’Occupation. En particulier au lycée Rollin, avenue Trudaine (IXème), rebaptisé depuis Jacques-Decour, du nom d’un de ses professeurs résistants également tués par les nazis.

Le cinéaste Claude Ventura, connu pour avoir imprimé sa marque à la mythique émission de télé Cinéma, cinémas, s’est inspiré de La guerre des cancres, ouvrage de Bertrant Matot, ancien pion du même lycée. Celui-ci, après avoir découvert toutes sortes de documents, photos et registres dans les combles de l’établissement, a reconstitué les itinéraires extrêmes de ces adolescents engagés. Appliquant son style habituel, fondé sur la voix off et une ambiance de polar, à cette véritable enquête, Ventura prolonge l’ouvrage de Matot en filmant les documents et en rencontrant certains survivants de l’époque. Il reconstitue certaines destinées aussi tragiques, paradoxales, que fascinantes.

On découvre ainsi que non seulement les élèves d’une même classe étaient ouvertement collabos et profascistes, d’autres communistes et résistants, mais que des membres de ces factions opposées étaient amis. Ainsi Jean Gay et Jacques Frantz furent d’abord membres de la JEC (Jeunesse étudiante chrétienne), puis choisirent des options diamétralement opposées. Pourtant ils passeront leurs dernières vacances ensemble, en 1943, dans les Alpes, avec d’autres condisciples. L’année suivante, Gay sera exécuté par les Allemands. Frantz, lui, s’engagera dans les SS ; il fera partie de la Charlemagne qui défendra le bunker d’Hitler à Berlin en 1945. Un autre de leurs camarades de classe, militant communiste, Karl Schönhaar, lui-même allemand, sera arrêté en possession d’un engin explosif lors d’une exposition anti-bolchevique. Il mourra comme Guy Môquet, au même âge, 17 ans.

On tombe des nues en découvrant une aussi intense activité politique dans les rangs d’un lycée parisien, dont le cinéaste explore les tenants et aboutissants avec sagacité. Les anciens élèves qu’il rencontre n’ont rien oublié : l’un d’eux assume franchement ses choix de jeunesse pro-fascistes ; un autre révèle l’aspect à la fois tragique et aléatoire du port de l’étoile juive.

Ce fut une des périodes typiques de l’histoire où l’indiscipline était non seulement une nécessité mais un devoir.

LES GARÇONS DE ROLLIN documentaire de Claude Ventura
Vendredi 3 Octobre, 23h15, FRANCE 3